Face à l’illusion des énergies renouvelables
Nous avons lu l’ouvrage très documenté et politiquement engagé de Fabien Bouglé : « Nucléaire, les vérités cachées » et sous-titré : « Face à l’illusion des énergies renouvelables ».
Il contient tout ce que l’honnête homme devrait savoir sur ce sujet.
Il est publié alors que Bill Gates affirme désormais son soutien à l’énergie nucléaire et vient d’investir fortement dans SMR, les petits réacteurs modulaires. Le GIEC lui-même, pour mieux lutter contre l’effet de serre, envisage de multiplier par 6 l’électricité nucléaire dans le monde d’ici à 2050. Cependant, il faudrait que l’Allemagne admette d’intégrer cette énergie parmi les énergies durables. L’AIE, l’Agence Internationale de l’Energie prévoit que la demande en électricité augmentera de 60% d’ici 2040.
Il n’y a pas, en effet, de développement sans énergie.
1•La technique :
Dans ce contexte, le nucléaire apparaît comme la meilleure énergie sûre et “décarbonée“.
Encore faudra-il convaincre l’opinion désinformée qu’il en est ainsi, et que les grandes tours de refroidissement des centrales n’ émettent que de la vapeur d’eau et pas de gaz à effet de serre (GES).
Or l’opinion est sous l’influence d’ONG anti-nucléaires et de promoteurs éoliens.
Rappelons qu’un réacteur classique comprend 3 circuits :
D’abord le circuit primaire où a lieu, dans le réacteur, la réaction de fission de l’Uranium 235 par des neutrons lents qui produit de la chaleur et transforme de l’eau liquide en vapeur d’eau.
Ensuite le circuit secondaire où la vapeur actionne une turbine, qui entraîne un alternateur produisant du courant, et un condenseur qui, enfin, est relié à la source froide. Ce peut être une tour de refroidissement eau-air, un fleuve (ex Tricastin sur le Rhône) ou la mer (Penly sur la Manche).
2•L’environnement :
Les énergies fossiles représentent actuellement 80% de la demande mondiale d’énergie primaire et les 2/3 des émissions de GES.
La France, grâce au nucléaire, émet 50 grammes de CO2 par kWH et l’Allemagne 10 fois plus du fait de ses centrales au charbon et au lignite.
La politique qui consisterait à réduire de 75% à 50% la part du nucléaire dans l’électricité et à compenser par des renouvelables serait catastrophique.
En France, les centrales nucléaires produisent normalement à plus de 70-75% de leur puissance maximum, c’est le facteur de charge (maintenance). Pour les éoliennes, c’est 24 % (si pas assez ou trop de vent) et les panneaux solaires 12% (nuit ou nuages).
L’éolien et le solaire sont intermittents, aléatoires, et non pilotables. Ils ont besoin de la béquille de centrales électriques à démarrage très rapides pour compenser ces carences. Plus on recourra aux renouvelables, plus on devra ajouter des centrales au fuel ou au gaz émettrices de GES, une vingtaine dans les 7 prochaines années. Absurde et contraire à l’effet recherché.
3•Les déchets :
65% des déchets nucléaires dans le monde proviennent des centrales électriques.
Les déchets nucléaires sont dénoncés par les activistes comme Greenpeace qui développent une véritable radiophobie, dénonçant leur quantité et leur dangerosité.
Pourtant, si on prend l’exemple de la SNCF : pour transporter 1.7 milliards de voyageurs, elle consomme annuellement 9 TWh (milliards de Watt heure) équivalents à 200 kg de déchets radioactifs à haute intensité. Avec du charbon, on aurait 700000 t de cendres solides et 1000 t de suies et de particules fines émises dans l’atmosphère.
Le charbon fournit 37% de l’électricité mondiale. L’équivalent électrique d’un kilo d’uranium, c’est 10 tonnes de charbon avec leurs déchets de métaux lourds (arsenic, plomb, thallium, mercure), d’oxydes de soufre, de dioxines, d’ammoniac, et des produits radioactifs.
La réglementation française fixe à 20 milliSieverts par an la dose de radioactivité à ne pas dépasser par précaution. L’exposition moyenne en France aux rayonnements naturels est de 2.5 mSv/an. Elle peut atteindre 50, voire 250 dans certains pays. La réglementation internationale fixe un seuil de 50 mSv/an ou 100 mSv sur 5 années consécutives.
Les ONG antinucléaires misent sur la méconnaissance du public pour l’affoler sur les dangers des déchets nucléaires. Ils mélangent tout au lieu de les distinguer selon leur activité (haute HA, moyenne MA, faible FA, très faible) et leur période de disparition (vie longue VL, courte VC (inférieure à 30 ans), très courte VTC).
Ces déchets sont gérés par l’ANDRA, l’Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs.
Les déchets HA sont très dangereux. Ils représentent 95% de la radioactivité totale et 0.2% de la masse, 10 t et 140m3 /an. Ils sont vitrifiés et mis en conteneurs.
Les déchets MA & VL représentent à peine 5% de la radioactivité, sont compactés en galettes et mis également en conteneurs.
Les autres déchets FA-VL ne représentent qu’un peu plus d’un millième de la radioactivité.
Le reste, les FA & VC représentent la quasi-totalité, soit 91 % du du volume total.
Les déchets HA et MA-VL sont destinés à être stockés à Bure à 500 m de profondeur dans une couche d’argile géologiquement très imperméable et stable.
4•Les scandaleux renoncements :
Il faut savoir que le gouvernement Macron avec le ministre Hulot a arrêté en 2019 le projet ASTRID de réacteur à neutrons rapides et caloporteur à sodium liquide, qui aurait permis de « brûler » les déchets HA-VL. En effet, ces déchets sont composés essentiellement d’U-238, qui est fertile et que les neutrons rapides rendent fissiles. Ce fut déjà le cas en 1997 où le premier ministre Jospin a arrêté le surgénérateur Superphénix du même type pour complaire à l’accord Aubry-Voynet préparé par Lepage. Un cauchemar technologique.
Ces ministres porteront devant l’histoire la responsabilité d’avoir cassé une filière où nous avions une grande avance technologique. Elle a depuis été développée par les russes et les chinois. Elle nous aurait permis de valoriser ces déchets et donné ainsi une autonomie énergétique nucléaire de plusieurs milliers d’années au rythme actuel de production électrique. Un nouvelle espoir arrive avec la découverte, par le français Gérard Mourou, d’une technique de transmutation au laser qui devrait permettre de réduire de plusieurs millions d’années à 30 minutes la période de déchets VL. Cette découverte fondamentale lui a valu un prix Nobel de Physique en 2018.
5•Le minerai :
L’uranium naturel nous vient du Kazakhstan, du Canada, d’Australie, de Namibie et du Niger. Il contient moins d’1% d’ U-235, le seul naturellement fissile, le reste étant composé d’ U-238 non fissile. Les réacteurs actuels ne sont enrichis en U-235 qu’a 3-5 %, le reste étant de l’U-238.
6•Les accidents :
Ils ne remettent pas en cause la sécurité de notre filière française.
Contrairement à la crainte véhiculée par les ONG, les réacteurs n’ont rien à voir avec une arme nucléaire, car il faut, pour fabriquer une bombe, un enrichissement en U-235 de plus de 90%.
Les 3 événements exploités par les ONG antinucléaires ont été : Three Mile Island 1979, Tchernobyl 1986 et Fukushima 2011.
- Three Mile Island : aucun rejet au delà de la barrière de confinement ; aucune victime.
- Tchernobyl : le plus grave. Centrale d’une génération ancienne. Erreur humaine dans le cadre d’un essai d’ alimentation électrique de secours et absence d’enceinte de confinement. Explosion et rejets radioactifs dans l’atmosphère qui survoleront une partie de la France (Alpes, sommets des Pyrénées et du Massif Central). Bilan 20 ans après : 50 décès et 4000 personnes qui pourraient décéder à terme du fait des radiations.
- Fukushima : centrale japonaise du secteur privé (Tepco) située en bord de mer, tsunami de force 9, digue débordée, générateurs de refroidissement en sous-sol noyés (c’est une erreur de conception). Évacuation massive de la zone polluée. Les 20000 morts sont essentiellement dus aux noyades et au stress des déplacements de populations.
Ces accidents ont conduit au renforcement des mesures de protection de nos 18 centrales pour 56 réacteurs subsistants après l’arrêt de Fessenheim qui était en parfait état de fonctionnement et nous rapportait 2 mlrds € /an d’exportations d’électricité. Cette fermeture a d’ailleurs conduit les allemands à construire une centrale à charbon à Datteln.
7•Prolonger une énergie sûre :
Il vaut mieux sécuriser et prolonger nos centrales plutôt que de multiplier les « renouvelables » qui ne nous servent à rien, qui ont besoin de l’appui du gaz, enrichissent l’Allemagne, les Pays-Bas et la Chine et sont un gaspillage d’argent public.
Les études montrent que contrairement à l’opinion répandue, le nucléaire est le mode de production d’électricité le moins dangereux.
Si on examine le nombre de morts par térawattheure produits dans le monde, selon l’ OMS, les données sont les suivantes :
- Nucléaire : 0.04 mort (y compris Tchernobyl et Fukushima).
- Éolien : 0.15 (hors gaz en appui !).
- Solaire : 0.44
- Hydraulique: 1.4
- Gaz: 4
- Biomasse : 24
- Pétrole : 36
- Charbon : 100
- Lignite : ? spécifique à l’Allemagne qui, en 2019 produit 48 % de son électricité par des énergies fossiles.
8•Diminuer le nucléaire au profit des « renouvelables » ?
La filière nucléaire française, attaquée par des ONG comme « Greenpeace » ou « Sortir du Nucléaire », est menacée à moyen terme par la fermeture de 17 réacteurs pour satisfaire un engagement de campagne de F. Hollande : réduire de 75 à 50% sa part dans notre électricité.
Outre la mise en cause de la sécurité, l’argument est devenu celui du coût. La dérive certaine du coût de l’EPR de Flamanville (12 mlrds€) reflète les difficultés rencontrées dans l’industrie avec les prototypes, mais reflète aussi la nécessaire requalification de nos ingénieurs et techniciens. L’EPR est pourtant un concept devenu une réalité en Chine. Deux exemplaires fonctionnent à Taischan depuis 2018.
EDF est prête à en construire en France au moins 6 pour un coût de 46 mlrds €, afin d’assurer l’approvisionnement de la France. Le coût actualisé de nos centrales nucléaires actuelles est de 90 mlrds €. C’est le coût de nos engagements d’investissements pour l’éolien qui produit 10 fois moins d’électricité. On peut estimer que l’investissement au kWh éolien est 4 fois supérieur au nucléaire.
Il faudra 2500 éoliennes de 2 MW pour remplacer la production de Fessenheim. Le prix garanti subventionné aux promoteurs de l’éolien est, pour le terrestre de 91€ le MWh, et de 180€ pour le marin, alors que le coût marginal du nucléaire est de 33€, y compris le grand carénage (extension en sécurité de leur durée d’exploitation au-delà de 60 ans). Le prix tout compris de l’électricité produite par les EPR est de 70€ le MWh.
De son côté Patrice Cahart, Inspecteur Général des Finances, calcule que, pour remplacer d’ici à 2035 12 réacteurs par des « renouvelables » (2/3 éolien et 1/3 solaire), il faudrait investir 145 milliards €, y compris un réseau de raccordement ramifié et des centrales gazières d’appui pour remédier à l’ intermittence. Or le grand carénage ne coûterait que 13 milliards, soit un gaspillage de 132 milliards!
9•Impact sur l’’emploi :
La filière électrique nucléaire est notre 3 eme secteur industriel générateur d’emplois non délocalisables. Elle représente 400000 emplois directs, indirects et induits.
On constate l’attitude désinvolte et incompétente de la ministre de l’Écologie, Barbara Pompili, Sciences Po Lille 97, LREM et ex LV, adepte du « quoi qu’il en coûte-quoi qu’il arrive ». Elle est étrangère à toute analyse rationnelle et argumentée. Elle souhaite même atteindre le tout « renouvelable » !
Les conséquences sur l’emploi seraient très importantes : un réacteur correspond à au moins 6000 emplois.
En revanche, l’éolien et le voltaïque ne disposent plus d’aucune filière industrielle chez nous. Les équipements sont importés du Danemark (Vestas), d’Allemagne (Siemens-Gamesa, Enercon, Senvion et Nordex) et d’ Espagne. Le solaire vient de Chine.
On sait que 55% de l’actionnariat éolien terrestre français est allemand.
Les seuls emplois du renouvelable concernent l’ assemblage et la maintenance.
10•Le « sabotage » anti-nucléaire :
Il est temps de mettre fin à cette folie. La France a construit le quart du parc nucléaire mondial et EDF exploite 20% de ce marché qui nous rapporte 6 milliards d’€ /an à l’export.
On assiste à un véritable sabotage de notre filière nucléaire. Elle produisait en 2019 537 TWh /an et en exportait 10%.
Le kWh payé par le consommateur français était en 2018 de 0.17€ et l’allemand de 0.29€.
La politique suivie est non seulement ruineuse pour notre balance commerciale, pour nos finances, pour notre industrie, pour nos emplois. Mais elle va conduire à doubler le coût de l’électricité pour le consommateur et les entreprises.
EDF est au bord de la faillite car l’Europe lui a imposé de vendre 25% de sa production à des concurrents purement commerciaux à 0.42 € le kWh (loi ARENH), de racheter prioritairement l’électricité éolienne au tarif subventionné de 0.90€ le kWh et à 1.8 € le maritime. C’est l’utilisateur qui en fait les frais avec une ligne CSPE sur ses factures d’électricité : Contribution au Service Public de l’électricité, dont le montant s’élève à 0.22€ / kWh en 2021, pour un total prélevé de plus de 7 milliards € /an.
Il est clair que si la part des sources intermittentes augmente, si la part du nucléaire diminue, alors que la consommation électrique s’accroît (véhicules électriques), nous allons nécessairement aller vers des « black out », sur le mode australien, même avec les limitations individuelles de consommation pernicieusement actionnées à distance par les compteurs Linky.
11•Ceux qui roulent pour l’étranger !
Fabien Bouglé dénonce nominativement les politiques qui, pour des raisons idéologiques, servent désormais les intérêts allemands et étrangers.
L’Ademe est devenue la championne des « renouvelables » et nombre de ses anciens dirigeants se retrouvent à la tête de syndicats de promoteurs éoliens. L’ancien chef du Bureau Énergie et Climat de notre Ministère de l’Environnement est devenu Directeur du lobby allemand Agora Energiewende.
Le livre dénonce les ONGs comme Greenpeace, dont le Chiffre d’affaires international était de 360 M€ en 2018. Certains la qualifie de mercenaire vert. Yannick Jadot, actuel président d’EELV, a été chef des « opérations spéciales » de Greenpeace France. On peut d’ailleurs s’interroger sur ses financements. Elle s’associe dans le cadre de partenariats financiers à des fabricants d’éoliennes comme Vestas. Par sa filiale Greenpeace Energy, elle est intéressée financièrement au développement des énergies « renouvelables ». Elle est membre de l’OFATE, l’Office Franco Allemand de la Transition Énergétique, une structure de droit allemand dont le siège est à Berlin et est installée en France à La Défense au sein même du Ministère de l’Ecologie ! Ainsi donc, l’OFATE, financée majoritairement par la filière éolienne, est installée au cœur de nos institutions pour promouvoir toutes les mesures défavorables au nucléaire français et favorables à l’éolien allemand et par là même au gaz russe qui l’accompagne.
C’est un vrai scandale !
Comme l’a dit récemment Yannick Jadot, qui vient de l’emporter de justesse sur l’extrémiste Rousseau : je vais moi aussi être extrémiste ! Il veut en effet sortir totalement du nucléaire en 20 ans. Le livre donne des détails sur la façon dont les verts servent les intérêts allemands dont la politique énergétique a cependant notoirement échoué.
C’est de la haute trahison.
12•Un espoir pour le nucléaire ?
Dans le même temps, on peut être surpris que Bill Gates se soit mis à investir dans les « petits réacteurs modulaires » à sodium liquide. Il doit avoir inspiré E.Macron qui découvre un intérêt pour les mini-réacteurs (30 à… 400 MW), une façon de repousser à 10 ans un concept dont en France, on ne voit guère l’intérêt, sinon de faire diversion.
Les russes et les chinois ont en revanche rattrapé leur retard dans les surgénérateurs.
Le projet ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) basé a Cadarache, ambitionne de développer le nucléaire de fusion, ce qui serait une révolution énergétique attendue pour le milieu du siècle. Cela n’empêche pas la Chine et les États-Unis, pourtant associés dans ITER, de poursuivre des recherches de leur côté.
13•Conclusion :
Il est temps que la France cesse les errements de sa politique pro-renouvelables et réinvestisse dans le nucléaire pour attirer de nouvelles générations d’ingénieurs, fournir à notre industrie une électricité stable à un prix compétitif, et éviter le hub gazier et les éoliennes allemandes. C’est un de nos derniers domaines d’excellence. L’indépendance énergétique de la France est en jeu !
Le livre « Nucléaire, les vérités cachées » de Fabien Bouglé devrait bousculer la campagne électorale qui débute.
À lire d’urgence …bien qu’il s’inscrive dans la lutte contre le carbone. On lui pardonne.