Les « gaz à effet de serre »

Cet article constitue une base technique nécessaire avant d’aborder le fonctionnement du climat et en particulier la régulation de la température terrestre, qui feront l’objet d’un article la semaine prochaine.

Note préliminaire :

L’atmosphère ne fonctionne pas comme une serre agricole (une serre agricole fonctionne par confinement de l’évaporation et de la convection). Néanmoins, pour respecter l’usage qui s’est installé, nous conserverons cette appellation, que nous désapprouvons.

Définition :

Quand on parle de « gaz à effet de serre », on parle en fait de 3 gaz qui font partie de l’atmosphère :

  • Le CO2 (dioxyde de carbone),
  • La vapeur d’eau (à distinguer des nuages, qui sont en fait de l’eau liquide en fines gouttelettes)
  • Le méthane (CH4)

 

Ces gaz ont en effet la propriété de bloquer une partie importante du rayonnement infra-rouge émis par la surface de la Terre, et donc d’empêcher son refroidissement.

Sur les 10 tonnes par m2 que pèse l’atmosphère,

  • La vapeur d’eau compte pour environ 25 kg (en moyenne),
  • Le CO2 pour 6 kg
  • Le méthane (CH4) pour 10 grammes.

 

Pour mémoire, l’Argon, premier des gaz « rares » de l’atmosphère, compte, lui, pour 130 kg : comparativement, les gaz à effet de serre sont des « gaz traces ».

Ces gaz à effet de serre ont la propriété d’opacifier l’atmosphère dans certaines bandes de fréquences : si notre spectre visible se situait dans ces bandes de fréquences, nous serions dans le noir.

Le graphe ci-dessous figure, en fonction de la fréquence de rayonnement (infra-rouge) (en abscisse) :

  • D’une part la courbe de l’intensité de rayonnement infra-rouge émis par la surface de la Terre (considérée comme un corps noir à 288K, soit 15°C) : courbe orange (en W/m2/THz) ;
  • D’autre part l’épaisseur optique (mesure de l’opacité de l’atmosphère vue du sol) dans ce spectre d’émission. Pour se repérer : une épaisseur optique de 1 correspond à peu près à l’opacité d’une feuille de papier : on peut considérer qu’à partir de 2, l’opacité est presque totale. On voit sur ce graphe la contribution de chaque gaz, pris individuellement, à cette opacité (en réalité, les épaisseurs optiques s’additionnent) : on voit en particulier que l’essentiel de cette opacité est due à la vapeur d’eau (courbe en bleu), le CO2 et le méthane (CH4) ne couvrant que des bandes de fréquences assez étroites.

Et on voit donc que la surface de Terre ne peut rayonner vers le cosmos que dans une fenêtre de fréquence comprise entre 23 et 36 THz (tera-hertz) où l’épaisseur optique est inférieure à 1. Cette « fenêtre » appelée « fenêtre atmosphérique » ou « fenêtre de la vapeur d’eau » laisse le passage du quart du rayonnement infra-rouge de la surface terrestre, le reste de ce rayonnement étant bloqué par l’opacité du reste du spectre.

On voit aussi qu’un doublement de la concentration de CO2 a un impact très faible (courbe noire vs rouge).On voit enfin que l’opacité du méthane est noyée dans celle de la vapeur d’eau, et n’a donc aucun effet au niveau du sol.

Cela dit, l’opacité de l’atmosphère diminue avec l’altitude, au fur et à mesure que l’atmosphère se raréfie. Et là, les gaz à effet de serre ont des comportements différents :

  • Le CO2 et le méthane sont dits « bien mélangés » : leur proportion (« mixing ratio ») dans l’air est constante, du moins jusqu’à la tropopause (environ 12 à 15 km d’altitude) ;
  • Par contre, la proportion de vapeur d’eau est divisée par 1000 entre le sol et la tropopause.

Au niveau de la tropopause (environ 12 à 15 km d’altitude), la densité de l’air est divisée par 5 :

  • L’opacité (épaisseur optique) du CO2 est donc aussi divisée par 5 : le CO2 reste donc encore un obstacle opaque au rayonnement.
  • Alors que celle de la vapeur d’eau est divisée par 5000 (elle disparaît, du fait de sa condensation dans les nuages) : elle est devenue transparente (la courbe bleue s’écrase quasiment totalement vers le bas) et peut donc laisser passer le rayonnement de l’atmosphère (en réalité dès 3 à 5000 m d’altitude environ : haut des nuages).
  • Quant au méthane, il devient quasiment transparent au-dessus de la vapeur d’eau.

 

On verra, dans l’article sur la régulation de la température, quels rôles jouent ces différents gaz, en particulier CO2 et vapeur d’eau.

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6 réponses

  1. Bonjour,
    Attention aux confusions possibles entre poids de l’atmosphère et densité de l’atmosphère.
    Il est écrit dans l’article « 10 tonnes par m² que pèse l’atmosphère ». Cela concerne le poids de toute l’atmosphère qui est au-dessus du sol sur 1 m².
    Dans l’article Wikipédia consacré à l’atmosphère : https://fr.wikipedia.org/wiki/Atmosph%C3%A8re_terrestre
    il est écrit au paragraphe Pression et épaisseur :
    « La masse totale de l’air est de 5 148 000 gigatonnes et la superficie terrestre de 51 007,2 méga hectares. Par conséquent 5148000 ⁄ 51007.2 = 10,093 tonnes par mètre carré »
    et au paragraphe Densité et masse :
    « La masse volumique de l’air au niveau de la mer est d’environ 1,2 kg/m3 », donc ce m3 au niveau de la mer, donne un poids de 1,2 kg/m², mais il faut ajouter tous les autres m3 au-dessus de lui pour avoir le poids total de l’atmosphère par m² au niveau de la mer, soit 10 tonnes par m².

  2. Passionnant car factuel. J’attends la suite avec impatience. Si je comprends bien c’est essentiellement la vapeur d’eau qui nous permet d’avoir une température vivable au niveau du sol quelques soient les émissions de CO2 et c’est le CO2 qui pourrait poser un problème si nous vivions dans la troposphère, ce qui n’est pas mon cas! Est-ce que je me trompe?

    1. En fait, nous vivons bien dans la troposphère, mais tout en bas.
      Ce que vous comprenez n’est pas tout-à fait exact : si la bande du CO2 était rectangulaire on pourrait-dire que ça l’est, … et même jusqu’en haut de la stratosphère, et non pas de la troposphère.
      Mais la bande du CO2 est plus ou moins trapézoïdale (avec même 1 ergot de chaque côté) : donc, sur les bords, un doublement a un effet (léger, je vous l’accorde).

      1. Merci mais je ne vois pas quel diagramme regarder pour voir le trapèze du CO2, mais j’attendrais le prochaine article pour mieux comprendre le comportement du CO2 en fonction de l’altitude.

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