Article de Judith Waintraub initialement publié dans le Figaro
DÉCRYPTAGE – La France renfermerait la deuxième plus grande réserve de gaz de schiste en Europe, derrière la Pologne, mais toute exploration et, a fortiori, toute exploitation sont interdites dans notre pays.
Environ 24 % du gaz consommé en France est importé de Russie*, le reste provenant pour l’essentiel de Norvège. C’est deux fois moins que l’Allemagne, dépendante à 49 % du gaz russe, mais c’est encore trop quand on sait que cette manne est la principale source de financement de la guerre de Vladimir Poutine en Ukraine. Or, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), le sous-sol français contiendrait 3870 milliards de mètres cubes de gaz de schiste. Les zones les plus prometteuses se situent dans la Drôme et dans les Cévennes, en Ardèche, dans le Gard, l’Hérault et la Lozère.
L’EIA (Energy Information Agency) avait publié en 2014 un atlas mondial des ressources en gaz de schiste. Les ressources européennes conduisaient à un plateau de production de 160 milliards de mètres cubes par an, soit le niveau des importations russes actuelles. La France et la Pologne disposaient chacune de 25 % de ces ressources. La consommation française s’est élevée à 40 milliards de mètres cubes en 2020.
Plusieurs ONG allemandes anti-gaz de schiste (et antinucléaires) ont été officiellement financées par Gazprom, ce dont Poutine s’est ouvertement vanté. Un échange de bons procédés.
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« NON »
par Matthieu Auzanneau*
On n’a aucune garantie industrielle que nos ressources en gaz de schiste permettent une production significative tant qu’on n’a pas commencé à forer, ce que l’accord de Paris interdit puisqu’il vise à se passer des énergies fossiles.
La technique d’extraction est secondaire. Il faudra de toute façon injecter du fluide et l’impact en termes d’émission de CO2 dû au trafic des camions sera toujours considérable.
Le nucléaire peut, sous certaines conditions, être un vecteur de la transition écologique, mais pas le gaz en général, ne serait-ce que parce que la consommation augmente et que les ressources s’épuisent. En mer du Nord, la production a été divisée par deux depuis les années 2000.
Déchirer l’accord de Paris serait une faute écologique, géostratégique et morale. L’enjeu pour le climat, c’est de se passer des énergies fossiles et la réponse n’est pas seulement dans la production, elle est aussi dans la consommation, comme le montrent les travaux du Shift Project.
* Président du Shift Project. Auteur de Pétrole. Le déclin est proche, avec Hortense Chauvin, Seuil, 160 p., 12 €.
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NDLR : pour mémoire, le Shift Project vit de la peur que suscite le réchauffement climatique.