Il faut utiliser les outils de l’analyse économique pour éclairer le débat sur le climat

Nous publions ici un article intéressant de Transitions & Energies du 19/8/23, qui reste dans la doxa alarmiste, mais montre l’impasse dans laquelle elle nous emmène.

Comment peut-on réussir à ne plus opposer fin du mois et fin du monde ? Il faut commencer par ne plus faire de la transition énergétique un débat moral et moralisateur. Il faut prendre en compte impérativement sa dimension sociale et économique. Il faut enfin cesser de se donner des objectifs totalement irréalistes de décarbonation et promettre une réindustrialisation verte et heureuse… L’Europe vient ainsi soudain de se rendre compte qu’en imposant le véhicule électrique à batteries elle met en danger de mort l’industrie automobile européenne pour des gains d’émissions carbone des plus limités.

Par Jean-Jacques Netter

 

On a longtemps vendu à l’opinion publique l’illusion d’une transition écologique merveilleuse, qui créerait emplois et richesses pour tous, tout en redonnant à la nature son lustre d’antan. Christian Gollier dans son livre « Le climat après la fin du mois » paru en 2019 a bien montré que la lutte pour le climat réduisait le pouvoir d’achat. Elle nous obligeait à nous détourner à moyen terme de cette énergie fossile qui a fait notre fortune pendant deux siècles et à demander aux pays en développement d’en faire autant. Cette guerre pour le climat ne pourra se gagner sans la mobilisation de chacun. Cela nécessite d’appliquer le principe pollueur-payeur, en imposant un prix universel du carbone reflétant la valeur du dommage qu’il génère, quitte à le compenser pour les plus pauvres.

La fin du mois passe avant la fin du monde

Comme on l’a vu avec les Gilets Jaunes, les Français ne sont pas prêts à sacrifier un peu de leur bien-être d’aujourd’hui pour améliorer le bien-être des générations futures, surtout si elles ne sont pas françaises. Pour la plupart, la fin du mois passe avant la fin du monde. Ce constat dérangeant pose la question de nos responsabilités envers l’humanité. Pour compléter son livre, Christian Gollier a donné en 2022 au Collège de France dans le cadre de la « Chaire Avenir Commun Durable » une série de huit leçons sur le thème « Fin du mois fin du monde ». Pour ceux qui n’auront pas le temps de passer huit heures à l’écouter voilà un résumé des principaux points qu’il a évoqué.

Réfléchir sur le réchauffement climatique suppose de répondre à plusieurs questions simples : comment diminuer le réchauffement climatique, qui doit payer et combien cela coûte. Il n’y aura pas de transition énergétique sans coût. Transformer le discours politique  en action est toujours compliqué.

Décroissants contre techno-optimistes

Il y a désormais un consensus pour réduire les émissions de CO2. Les climato sceptiques sont de moins en moins nombreux (NDLR : cette affirmation est fausse : selon un récent sondage, la proportion de climato-sceptiques en France est de 37%, en augmentation). Les partisans de la décroissance sont encore obligés  d’affronter les techno-optimistes. L’Europe a déjà réduit ses émissions de 25% depuis 20 ans. Elle émet 2,7 Gigatonnes de CO2 par an, soit le même niveau que l’Inde, la moitié de l’Amérique du Nord et quatre fois moins que la Chine. A partir de ces chiffres on voit bien que la question climatique ne sera pas résolue par l’Europe mais surtout par les autres.

On cache le fait que l’on ne diminuera pas de 55% les émissions de CO2 d’ici 2030. Pour atteindre l’objectif de limiter à 2° celsius l’augmentation de la température, il ne faudra pas que le monde émette plus de 900 Gigatonnes de carbone pour les 30 prochaines années . Aujourd’hui on émet 40 Gigatonnes chaque année. (NDLR : selon la tendance actuelle (sur plus de 40 ans), il n’y a pas d’accélération du réchauffement, et nous ne devrions pas dépasser ces 2°C tout en continuant le développement de la Chine et de l’Inde)

Concilier objectif climatique et justice sociale

Comment concilier un objectif climatique ambitieux avec la justice sociale? Le coût de l’énergie pourrait doubler avec une énergie décarbonée. Ce sont les ménages les plus modestes qui sont les plus vulnérables, car augmenter le prix de l’énergie accroit les inégalités. Il y a des actions trop coûteuses par rapport aux objectifs de diminution de CO2.

Jusqu’où faut-il sacrifier le pouvoir d’achat des générations présentes pour affronter nos responsabilités envers les générations futures. Peut-on demander à des ménages aux revenus modestes de consacrer une année de leurs revenus pour changer de chaudière et de voiture. Rappelons que tout le monde en France paye la Contribution au Service Public de l’Electricité au taux de 17%

Comment sacrifier le présent pour des bénéfices futurs c’est le principe de l’actualisation. (1€ dans 35 ans c’est 0,25€ aujourd’hui actualisé à 4%).

Peut on demander  aux gens d’aujourd’hui de faire des efforts pour des gens qui seront plus riches que nous ? Pourquoi dois je m’intéresser aux générations futures ? Qu’ont-elles fait pour moi disait Groucho Marx

L’efficacité inégale des actions climatiques

Le bilan de l’Etat planificateur et investisseur dans le domaine de l’énergie est peu concluant tant au niveau européen qu’au niveau français. L’Union Européenne a mis en place en 2005 un marché alimenté par des quotas gratuits de quotas CO2 alloués cimentiers et les sidérurgistes, les fabricants d’aluminium. Cela leur a permis de gonfler leurs résultats.  Toujours en vigueur, il est appelé à disparaitre en 2034. Il sera remplacé par « un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières ». Selon une enquête du journal Le Monde. La revente  de ces quotas entre 2013 et 2021 a rapporté 98,5 Md€ aux industriels concernés alors que les sociétés bénéficiaires n’ont consacré que 25 Md€ à l’action climatique.

En plus, une énorme fraude à la TVA a déstabilisé le système à ses débuts faisant perdre 6 Md€ à l’Union Européenne dont 1,6Md€ à la France. Une trentaine de Franco-Israélien ont été condamnés dans cette affaire mais les demandes d’extradition formulées par la France n’ont pas été exécutées.

En France, une des grosses erreurs a été la promotion du photovoltaïqueLe KWh d’électricité produit coûte 1.820€ pour éviter une Tonne de CO2 en 2035.

Cela aurait été beaucoup plus efficace d’inciter l’Allemagne à sortir plus vite du charbon qui constitue encore 45% de son mix énergétique. En effet éviter une tonne de CO2 revient seulement à 36€ pour le charbon. Le fait de ne pas l’avoir fait est une erreur écologique majeure. La Grande Bretagne a éliminé ses centrales à charbon en dix ans. A ce stade on peut d’ores et déjà estimer que la promotion des panneaux solaires par le gouvernement a été une grosse erreur d’autant plus qu’ils ont quasiment tous été importés de Chine !

Avant tout de la communication politique à court terme

De nombreuses mesures ont été prises par le gouvernement français beaucoup plus inspirées par la communication à court terme que par l’efficacité à long terme. La liste de ces mesures est éloquente notamment :  la réglementation du chauffage des terrasses de café, le passage de la vitesse sur route de 130 km/h à 110 km/h, la fixation d’une température maximale pour les appartements…Pour couronner le tout le gouvernement s’est cru obligé de faire appel à une « Convention Citoyenne pour le climat » constituée de 150 personnes tirées au hasard pour proposer des mesures au gouvernement. C’est une méthode plus que contestable. Tout cela pourrait donner l’impression que si les politiques publiques  ne sont pas plus volontaristes « c’est qu’on a encore le temps »

Les éoliennes ont envahi les campagnes et les littoraux sont devenues dans le monde entier par une propagande systématique le symbole de l’écologie et de la lutte pour le climat. Derrière cette image verte on trouve pollution, émissions de CO2, atteintes à la santé et à la biodiversité, détournement de fonds publics, augmentation du prix de l’électricité, conflits d’intérêts, mafia… L’éolien est donc une fausse énergie propre, une fausse énergie renouvelable.

Les éoliennes, dont certaines atteignent maintenant deux cents mètres de hauteur, ravagent nos paysages, qui sont le cadre de vie des Français, et l’une des bases de notre tourisme.

De surcroît, le courant d’origine éolienne coûte deux fois plus cher que celui des centrales nucléaires actuellement en service,

L’écologie punitive a encore ses partisans. La dernière proposition de mesure stupide émane de Jean Pisany Ferry de restaurer l’ISF en le baptisant climatique. Il s’agirait d’« un prélèvement exceptionnel sur le patrimoine financier des ménages les plus aisés ». Rappelons que ce sont eux qui payent déjà 70% de l’impôt sur le revenu ! Les effets de ce genre de mesure sont déjà très bien documentés. Cela relancerait l’exil fiscal et menacerait les investissements productifs. L’ISF Climatique de Jean Pisany-Ferry fait partie des mauvais réflexes typiquement français. C’est la solution pavlovienne de l’énarchie française. Un problème se règle avec une taxe. Ce n’est pas la richesse qu’il faut taxer mais les comportements. Augmenter les impôts des « riches » au moment où l’on a besoin de leurs investissements n’est pas une bonne idée.

Les incertitudes de la dynamique climatique

Il faut avant tout ne pas politiser le débat et éviter l’idéologie. Toutes les décisions présentées comme vertes ne sont pas socialement souhaitables. Le coût d’abattement d’une Tonne de CO2 par un panneau solaire importé de Chine est totalement excessif

Le rythme de croissance de l’économie mondiale est une grande inconnue… Grâce à la technologie, le mariage entre l’écologie et l’économie deviendra favorable.

Le progrès technologique devra être intensifié car le coût de stockage reste très élevé pour les énergies renouvelables.

Les outils à utiliser et privilégier

Il faut un signal prix pour montrer le dommage que l’on crée à autrui. C’est le principe pollueur /payeur. Le prix de la valeur carbone est un sujet de friction mais il faut savoir affronter la réalité. Elle devrait être autour de de 160€/T. La valeur carbone c’est le thermomètre. Il y a deux approches : celle du coût/bénéfice et celle du coût/efficacité.

Sous Obama la valeur carbone était de 42€ /T-CO2 et sous Trump de 7€ /T-CO2 !

La taxe carbone n’a rien à voir avec la valeur carbone Le mouvement des gilets jaunes a été déclenché car le gouvernement voulait faire passer la taxe carbone de 35€ à 44€. Elle avait été très mal expliquée. Il y a aussi la taxe carbone aux frontières. Cela suppose que le prix de la taxe carbone soit aligné dans toute l’Europe pour se défendre contre la Chine où le prix est de 5€ la tonne.

Un marché de permis d’émission a été mis en place par l’Europe en 2005. En 2021 le prix a été multiplié par trois à 90€, ce qui rendait le charbon non compétitif.

Le prix de la valeur carbone est trop faible. On joue notre destin à la roulette russe.

Le taux d’actualisation est une donnée essentielle. En le réduisant il y a plus de projets éligibles. En retenant un taux de 1% cela donnerait comme prix de valeur carbone 450€ en…

Les modules de science du climat sont difficiles à manier. Cela fait deux siècles que la civilisation industrielle libère les hommes de la misère. Les apôtres de l’écologie radicale dépeignent le passé comme un paradis perdu qu’il n’a jamais été. Des antimodernes comme Pierre Rahbi, Greta Thunberg en passant par Nicolas Hulot passent leur temps à crier à la catastrophe. Le progrès technique reste pourtant le moyen le plus juste pour sauvegarder la planète.

L’obscurantisme écolo-bobo-bio est censé représenter le « bien » avec ses mots vertueux : écologie, environnement, éolienne, lanceur d’alerte, santé…Tous ceux qui pensent bien ont droit à des qualificatifs positifs : vert, naturel, durable, circulaire, biodynamique, biologique, photovoltaïque, recyclable, économe, local, associatif, décentralisé.

De l’autre il y a « le mal » : nucléaire, pollution, croissance, climato-sceptique, charbon, pesticides, OGM. Tous ceux qui ne pensent pas convenablement font l’objet de qualificatifs négatifs : polluant, dangereux, intensif, capitaliste, industriel, cancérigène, corrompu…

Il s’agit évidemment d’une synthèse rapide, mais elle montre que le problème qu’affronte l’humanité est tout sauf insurmontable. Il faut avant tout être capable d’établir une stratégie cohérente, réaliste, de refuser les diktats et les anathèmes, de résister aux lobbys de toute nature et de refuser la démagogie. Vaste programme…

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Une réponse

  1. L’article semble ne pas remettre en cause la taxe carbone! C’est une erreur fondamentale dans un texte qui se veut économique. Cette taxe est destinée à obtenir que les énergies à l’origine des augmentations de CO2 soient de moins en moins utilisées. Elle n’a donc aucune raison d’être si on ne croit pas à l’effet CO2! De plus il n’y a aucun besoin de taxer quoi que se soit pour obtenir une réduction puisque les prix des énergies fossiles ne vont faire qu’augmenter ce qui réduira leur utilisation par le simple effet du marché. Nous aurons néanmoins besoin de plus en plus d’énergie et seules les centrales nucléaires permettront de faire face. Si on ajoute que pour les transports des carburants synthétiques seront nécessaires, cette énergie nucléaire sera bien utile pour leurs productions et là encore le marché se chargera de régler les prix! Toutes ces simagrées pour le contrôle des énergies ne sont que des actions inutiles proposées par des ignorants qui se voient en sauveur de la planète alors qu’ils ne font que retarder les actions salutaires des plus entreprenants qui, sans eux, feraient confiance au marché!

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