(Par Philippe Thomazo dans Transitions & Energies du 12/2/24)
NDLR : Pour mémoire, nous rejetons 40 milliards de tonnes de CO2 par an
Capturer et stocker le carbone est considéré par de nombreuses institutions allant du GIEC à l’Agence internationale de l’énergie comme indispensable pour atteindre les objectifs de réduction rapide des émissions de gaz à effet de serre. Mais il s’agit néanmoins de technologies sur lesquelles subsistent de nombreux doutes. Combien de temps faudra-t-il pour qu’elles parviennent à maturité ? Pourront-elles passer à une échelle industrielle ? Et sera-t-il possible de les faire fonctionner à des coûts acceptables et supportables ? Une partie des réponses sera apportée avec l’ouverture ce mois-ci en Islande de ce qui sera la plus grande usine de capture de carbone dans l’atmosphère au monde.
La nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre est un fait que personne – ou presque – ne nie aujourd’hui. Les débats principaux portent sur la manière de réduire les émissions et non sur l’opportunité de le faire. Une autre approche – qui n’est pas opposée mais complémentaire – consiste à développer des technologies de capture et de stockage du carbone. Soit de façon dynamique, directement à la sortie de la cheminée d’une usine dite CCS (Carbon Capture and Storage), soit de façon statique en réduisant le stock de CO2 présent dans l’atmosphère dite DAC (Direct air capture).
Si les derniers rapports du GIEC évoquent systématiquement la capture et le stockage du carbone et lui attribue un rôle important à jouer dans le combat climatique qui se déroule aujourd’hui, les doutes existent et subsistent sur la possibilité de voir ses technologies parvenir rapidement à maturité et plus encore passer à une échelle industrielle massive et tout cela avec des coûts acceptables et supportables.
Des ventilateurs géants
L’ouverture ce mois-ci de ce qui sera la plus grande usine de capture de carbone au monde peut entretenir l’espoir de voir cette technologie prendre son envol. Installée à Hellisheidi en Islande, développée par la start-up Carbfix, cette usine utilisera la technologie DAC. Elle utilise des ventilateurs géants pour brasser l’air ambiant, le filtrer et, grâce à des processus chimiques, en extraire le carbone. Celui-ci est ensuite injecté dans des formations rocheuses basaltiques souterraines, où il se minéralise et se stocke de façon permanente.
Pour développer ce projet ambitieux, la start-up a bénéficié d’un soutien de taille, puisqu’il s’agit de Bill Gates qui a investi une partie de sa fortune dans la recherche et la construction de ce démonstrateur. Avec une capacité de « seulement » 4.000 tonnes par an, il restera encore beaucoup à faire pour que cette technologie puisse avoir un impact réel sur la quantité de CO2 dans l’atmosphère (NDLR : juste multiplier par 10 000 000). Mais il s’agit d’une étape importante : la première installation à un stade pré-industriel d’une technologie DAC.
Sans doute une nécessité
D’autres projets, dont certains bien plus ambitieux encore, existent dans le monde afin d’apporter leur pierre à l’édifice de la décarbonation des activités humaines. Compte tenu de la profusion de technologies envisagées et testées, la plupart sont condamnées à disparaître, faute d’efficacité technique, industrielle et économique. Mais enfouir et récupérer une partie de nos émissions passées est sans doute une nécessité. Surtout si elle est faite en parallèle avec une réelle volonté de réduire les émissions un peu partout dans le monde. Il y a des solutions bien réelles à un problème qui ne se règlera pas d’un coup de baguette magique mais qui n’est pas non plus insoluble.
Une réponse
Sauf que réduire les émissions de gaz à effet de serre n’a quasiment aucune incidence sur le climat, et qu’à l’inverse, réduire le CO2 est un non-sens à l’approche des 10 milliards d’humains à nourrir.