Financement aux fossiles : les banques françaises sont-elles vraiment les meilleures élèves ?

Nous republions ici un article de novethic (1) du 13 Mai 24, qui nous paraît symptomatique de la volonté d’empêcher la prospection des énergie fossiles, et donc le développement des pays pauvres.

(1) “Novethic est une filiale de la Caisse des dépôts et consignations, fondée en 2001. C’est un média en ligne spécialisé dans la finance durable et l’économie socialement responsable.” (wikipedia)


Le financement des énergies fossiles par les grandes banques françaises s’est infléchi en 2023. La chute est particulièrement notable pour BNP Paribas, assignée en justice début 2023 sur son devoir de vigilance et sa responsabilité dans la crise climatique. Mais les ONG appellent à aller plus loin.

C’est un premier signal qui va dans le bon sens. Le rapport Banking on climate chaos, réalisé tous les ans par les ONG Urgewald, ReCommon, BankTrack, Les Amis de la Terre et Reclaim Finance, en amont des assemblées générales des banques, recense les financements octroyés par ces dernières aux industriels des énergies fossiles. Depuis l’Accord de Paris en 2015, les 60 grandes banques internationales ont ainsi fléché près de 6 900 milliards de dollars en direction des énergies fossiles. Mais la part des principales banques françaises (BNP Paribas, Société générale, Crédit agricole et BPCE), est en chute, passant de 24,8 milliards de dollars en 2022 à 14,5 milliards en 2023.

La baisse est particulièrement notable pour BNP Paribas, qui passe de 10 à 4 milliards de dollars. Alors que la banque était classée au 1er rang des financeurs mondiaux des 9 majors européennes et américaines (1) entre 2016 et 2022, elle est reléguée au 9e rang en 2023.

Si la baisse des financements de BNP Paribas aux majors est bienvenue, elle doit impérativement se traduire dans un engagement ferme à cesser de soutenir toute expansion du pétrole et gaz”,

réagit Lorette Philippot, chargée de campagne aux Amis de la Terre France.

“BNP ne fait plus partie des grands acteurs du financement du fossile”

Début 2023, BNP Paribas avait été assignée en justice sur son devoir de vigilance par trois ONG – Les Amis de la Terre France, Oxfam France et Notre affaire à tous – le premier contentieux climatique au monde à viser un acteur bancaire. Mais depuis, la banque a pris de nouvelles mesures concernant l’extraction et la production de gaz et de pétrole. Ce lundi 13 mai, à la veille de son Assemblée générale, elle annonce l’objectif de réduire de 70% ses émissions financées en valeur absolue pour le secteur pétrole et gaz d’ici 2030, par rapport à 2022, selon une porte-parole.

En février dernier, le groupe s’était aussi félicité dans une communication de ne plus faire partie

des grands acteurs du financement du fossile“. “BNP Paribas a considérablement réduit sa production de nouveaux crédits au secteur pétrolier et gazier en 2023. Par exemple, à fin 2023, le rapport entre les flux de financement octroyés aux acteurs spécialisés dans l’extraction et la production pétrolière et gazière et les flux de financement liés aux projets d’énergies renouvelables s’établit à 1 sur 11”, 

se targue la banque. En outre, elle précise n’avoir participé à aucune émission obligataire au secteur pétro-gazier depuis la mi-février 2023.

Si les ONG saluent ces efforts, elles appellent la banque à les inscrire formellement dans de nouvelles politiques sectorielles et à aller plus loin en arrêtant 

“tout nouveau service financier aux entreprises qui développent les pétrole et gaz”,

à l’instar d’Eni. En décembre 2023, BNP Paribas a en effet contribué à un prêt de 3 milliards de dollars pour la major pétro-gazière italienne, un sustainability linked loan (SLL), censé être lié à l’atteinte d’objectifs climatiques, notamment de développement des renouvelables. 

“Mais rien ne garantit qu’il sera fléché vers un projet d’énergies renouvelables“, pointent les ONG.

Le financement de la transition reste faible

Si les principales banques françaises sont désormais peu exposées au charbon et ont exclu le financement de nouveaux champs pétroliers et gaziers de leurs portefeuilles (à part BPCE qui peut toujours financer de nouveaux champs gaziers), il reste la délicate question des terminaux de gaz naturel liquéfié (GNL). Crédit Agricole et BPCE ont ainsi augmenté leurs financements à l’expansion du GNL entre 2021 et 2023, respectivement de 40% et 41%.

Parallèlement, leurs financements dans les énergies bas-carbone restent relativement faibles : seuls 7,5% des financements des banques françaises aux 5 plus grandes entreprises pétrolières et gazières européennes ont été fléchés vers leurs projets ou filiales “bas carbone” entre 2020 et 2023, selon des données inédites publiées par Reclaim Finance.

Alors qu’elles défendent leurs soutiens aux plus grandes entreprises pétrolières et gazières au nom de leur diversification et capacité à financer la transition, les banques françaises sont loin de financer la transition quand elles accordent de nouveaux soutiens à ces entreprises, contrairement à ce qu’elles prétendent”, fustige l’ONG.

A l’approche des assemblées générales des banques françaises, la première ayant lieu mardi 14 mai chez BNP Paribas, le sujet sera abordé sous forme de questions écrites. Le Forum pour l’investissement responsable (FIR) prévoit ainsi de leur demander

si elles allouent annuellement un ratio de 6 dollars à l’approvisionnement en énergie propre pour chaque dollar alloué aux énergies fossiles, conformément aux recommandations du scénario Net Zero de l’AIE d’ici 2030“,

résume Marie Marchais, responsable de l’engagement. Aucune résolution climatique n’a en revanche été déposée.

 

(1) BP, Chevron, ConocoPhillips, Equinor, Eni, Exxon, Repsol, Shell et Total.


 

NDLR : les banques aussi ont le devoir de se ruiner en faveur des énergies renouvelables, surtout les banques françaises.

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