Bakou, sur la route de la servitude verte

COP, COP, COP, le retour, 29e épisode et sa ponte d’une avalanche de « on vous l’avait dit ; il est minuit moins une » (minute, seconde, nanoseconde, au choix), etc.

« Nous l’avons tous entendu à maintes reprises, écrit la présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, dans un article d’opinion du Financial Times du 12 novembre 2024, soit nous luttons contre le changement climatique et préservons la nature, soit nous payons le prix fort de notre inaction et ce prix croît de jour en jour. »

Elle écrit, en anglais : « tackle climate change » et « safeguard nature ». Sur le second point, qui ne s’accorderait pas, par exemple, à considérer comme inqualifiable qu’un pays laisse une entreprise de son ressort déverser, fût-ce accidentellement, deux tonnes de latex dans un fleuve sans qu’il n’avertît le pays voisin en aval de cette pollution ? C’est pourtant ce qui s’est produit le 13 novembre lorsque que la Meuse a été polluée par une entreprise française sans que les autorités françaises n’en préviennent les autorités belges. Une honte.

Quant à tacler le climat, le mot est le même qu’au foot lorsqu’un joueur cherche à chiper le ballon à un adversaire, mais c’est plus compliqué avec le climat, le sens est ici de fournir les efforts nécessaires afin de résoudre un problème. C’est d’autant plus compliqué que toutes les données du problèmes ne nous sont pas connues, loin s’en faut (cf. Steven E. Koonin, Unsettled: What Climate Science Tells Us, What It Doesn’t, and Why It Matters, 2021).

Et, Mme Lagarde, de faire le lien avec les récentes inondations en Espagne, les sécheresses dans le bassin amazonien et les cyclones en Amérique du Nord, des événements « horribles en soi » certes, qui ruineraient, selon elle,

« les fondements de nos économies et, en fin de compte, la base de notre survie économique »,

toutes choses que les travaux du GIEC ne corroborent en aucune façon, Koonin le souligne et l’explique dans Unsettled.

Pour faire face, il est urgent d’investir. L’eussiez-vous deviné ? Et, eussiez-vous cru qu’on dépensait déjà tant et plus d’argent des autres et le vôtre pour arriver à des résultats insignifiants, que vous n’auriez encore rien vu venir. Mme Lagarde estime que pour rester sur la bonne voie (laquelle ?) et atteindre les objectifs de l’« Accord de Paris » (dont tout esprit sensé sait qu’ils ne le seront jamais), l’investissement mondial dans l’atténuation du changement climatique et l’aide à la « transition de nos économies » doit être de 11.700 milliards de dollars par an d’ici 2035 d’après le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), soit environ 10% de la production mondiale annuelle.

Et encore Mme Lagarde entrevoit-elle deux autres domaines d’intervention (l’adaptation et l’aide en cas de catastrophe) qui laissent de fort belles perspectives aux grands financiers de ce bas monde de faire « transiter vos économies » – c’est ici des vôtres qu’il s’agit – et de vous faire passer le goût d’en réaliser à tout jamais.

En effet, Mme Lagarde écrit qu’il est urgent de débloquer « toutes les sources de capitaux possibles » nécessaires au financement de notre « avenir vert » et à la préservation de la nature (dont il serait étonnant qu’elle compte pour beaucoup dans les 11.700 milliards de dollars par an – excusez du peu !).

Quelles que soient les mesures – « justes et équitables », s’entend – que nous prendrons, nos sociétés en seront transformées, avoue Mme Lagarde. Au prix indiqué, c’est à ne pas en douter. La transition énergétique (laquelle ? Celle de l’Allemagne, à base de centrales au lignite?) requiert, justifie-t-elle, un triplement (pourquoi pas doublement ou quadruplement ? Allez savoir!) des investissements dans les « énergies propres » et le « déficit de financement » – la différence entre ce qui est prévu et ce qui est nécessaire – ne cesse de se creuser. Il s’élève à 50%, soit « jusqu’à dix-huit fois plus que les engagements actuels ». Peuchère ! eût dit Pagnol.

Bref, s’il y a eu accord sur le Fonds des pertes et dommages il y a deux ans lors de la COP27 à Charm el-Cheikh, il appartient à la COP29, qui s’est ouverte lundi à Bakou, de le pourvoir.

Réaction d’un lecteur du FT :

« The emissions for flights from Frankfurt to Baku one wonders ? » (On peut se demander quelles sont les émissions pour les vols de Francfort à Bakou?).

D’un autre :

« Beyond parody » (Au-delà de la parodie). D’un autre : « Trump elected, so good luck with that » (Trump a été élu, alors bonne chance).

Et plus pertinent :

« Mme Lagarde a-t-elle écrit cet article d’opinion en tant que citoyenne ou comme présidente de la BCE ? Dans ce dernier cas, le changement climatique relève-t-il du mandat de la BCE et, si oui, quels instruments de la BCE peut-elle/veut-elle utiliser pour lutter contre le changement climatique, les taux d’intérêt, la dette ? Voilà de vraies questions. »

Revenons-en pour conclure au niveau de 11.700 milliards d’investissement par an devant être atteint d’ici 2035 pour assurer notre survie.

Le groupe de travail II de l’AR5 du GIEC, cité par Koonin dans son livre, a publié des estimations selon lesquelles une hausse de la température mondiale de 3° C d’ici 2100 aurait un impact négatif sur l’économie mondiale de 3%. Pas par an. Sur toute la période ! Soit une diminution du PIB mondial d’environ 0,04% par an, à mettre en regard des 10% par an du PIB que Mme Lagarde préconise d’investir en vue de notre survie économique.

Commentaire d’un lecteur du FT :

« Our economic survival depends on doing the exact opposite of what you advocate, you quaffed perma-failure. »

Voilà qui, en termes de capital vert, n’est peut-être pas faux.

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