La transition vers l’électrique de l’industrie automobile européenne ne se fait pas sans heurts. Volkswagen vient d’annoncer un plan drastique de réduction des coûts de l’ordre de 15 milliards d’euros par an d’ici 2030. Pour le lobby européen de l’automobile, il faut assouplir les normes pour redonner de l’air aux constructeurs. Une mesure de court terme qui ne satisfait pas les ONG.
Le verdict est tombé pour les salariés de Volkswagen. Après une semaine de négociations intenses, les dirigeants du groupe, le syndicat IG Metall et le comité d’entreprise se sont mis d’accord sur un plan de réduction des coûts qui devrait entraîner la suppression de 35 000 postes en Allemagne d’ici 2030. Volkswagen met ainsi en pratique l’annonce qu’il avait faite, quelques mois plus tôt, de mettre fin à l’accord garantissant l’emploi en Allemagne en vigueur depuis 30 ans. Les suppressions annoncées se feront de manière « socialement acceptable » assure le groupe, le reste des effectifs bénéficiant pour leur part d’une garantie d’emploi jusqu’en 2030. Le syndicat a également obtenu qu’aucune usine allemande ne ferme, et que le groupe ne réduirait pas les salaires.
Intitulé « Zukunft Volfkswagen », ou le futur de Volkswagen, ce plan drastique de réduction des coûts illustre les difficultés rencontrées par l’industrie européenne pour réussir sa transition vers un modèle bas carbone. Le puissant groupe aux nombreuses marques (Volkswagen, Audi, Skoda, etc.) sent monter la panique depuis quelques mois. Ses ventes de voitures, si elles avaient remonté la pente sur l’année 2023 avec 9,24 millions de véhicules écoulés en hausse de 12% par rapport à l’année précédente, demeuraient en-dessous de l’objectif de 9,5 millions fixé initialement. Cette légère hausse intervenait après trois années de baisse consécutives, que le constructeur imputait aux pénuries et difficultés de livraison suite à la pandémie.
15 milliards d’euros par an de réduction de coûts
Depuis l’été dernier, la crise s’est encore intensifiée à Wolfsburg, siège de l’entreprise. Les difficultés sur le marché chinois, où les constructeurs locaux ont fini par devancer l’Allemand, et le trop lent démarrage des voitures électriques, se font ressentir durement dans les résultats. Le groupe a enregistré une chute vertigineuse de 64% de ses bénéfices au troisième trimestre 2024. L’annonce d’un plan d’austérité a suivi très vite, s’achevant par le compromis avec les syndicats. En tout, Volkswagen prévoit de réduire ses coûts de l’ordre 15 milliards d’euros par an sur les prochaines années. L’accord sur les réductions d’effectifs, qui se double d’une réduction des capacités de production de 734 000 véhicules en Allemagne, compte en tout pour 4 milliards d’euros d’économies par an, dont 1,5 milliard d’euros pour le seul coût de la main d’œuvre.
Avec son plan « Zukunft Volkswagen », le constructeur ambitionne de renouer avec le succès, en se positionnant sur les technologies liées à la mobilité durable. Mais Volkswagen, comme la plupart de ses homologues européens, semble avoir pris beaucoup de retard dans une transition bas carbone où les constructeurs chinois ont un train d’avance. Des marques chinoises comme BYD, avec des voitures électriques à prix plus abordables, menacent ainsi de prendre d’assaut le marché européen. L’industrie chinoise bénéficie également d’un savoir-faire dans la fabrication de batteries pour les voitures électriques largement supérieur, tandis que l’Europe peine encore à construire sa propre filière.
Les constructeurs européens blâment de leur côté la réglementation, trop stricte, trop ambitieuse, qui ne leur laisse pas le temps de s’organiser. Le Green deal prévoit d’une part la fin du moteur thermique en 2035, et de nouvelles normes d’émissions de CO2 des voitures vont s’appliquer dès l’année prochaine, imposant de ne pas dépasser 95 grammes de CO2 par kilomètre en moyenne sur toute la gamme. Depuis plusieurs mois, l’ACEA (Association européenne des constructeurs automobiles) fait du lobbying pour adoucir les normes, obtenant notamment de la part d’Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, la tenue d’un dialogue stratégique sur le futur de l’industrie automobile européenne à partir de janvier 2025.
Renforcer la demande en Europe
Mais l’ACEA veut aller plus vite et demande à la Commission de clarifier avant la fin de l’année sa position sur les normes. Le lobby agite la menace de la perte de compétitivité si les normes ne sont pas assouplies :
« l’industrie automobile risque de perdre jusqu’à 16 milliards d’euros de capacité d’investissement soit en payant des amendes, en réduisant la production, en s’associant avec des concurrents étrangers ou en vendant des véhicules électriques à perte », assure Luca de Meo, président de l’ACEA et directeur général de Renault.
Une position que réfute l’ONG Transport et Environnement (T&E), qui estime que le report des normes ne sert que la stratégie à court terme des constructeurs.
« Le résultat serait des ventes de voitures électriques plus faibles, une électrification plus lente, moins de demande pour les énergies renouvelables. Pendant ce temps, en Chine…« , écrit William Todts, le directeur exécutif de l’ONG sur LinkedIn.
T&E plaide plutôt pour une refonte totale des aides d’Etat européennes pour la mise en place d’une réelle filière technologique bas carbone, dont la production de batteries, en faisant en sorte de préserver les entreprises européennes de la compétition internationale. L’ONG propose aussi de renforcer la demande pour des voitures électriques et autres produits bas carbone, avec une loi « Buy Europe ».
Une réponse
On imagine mal ce qui va se passer dans les bassins d’emploi concernés quand 35000 gugusses vont se retrouver sur le carreau et chercheront tous un travail!
Et s’il n’y avait que WV, ils pourraient espérer s’en sortir, mais les sous-traitants vont boire la tasse aussi, et les autres constructeurs ou industriels, pareil!
Ah elle est belle la situation que nous ont fabriqué l’UE, les écolos, et les pieds nickelés que l’on nomme politiques! Pas sûr que ça se termine aussi bien que ça a commencé!
CPEF