Malgré la crise énergétique, les Allemands surconsomment le gaz

(Article repris de FRONTPOPULAIRE du 11/10/22)

L’autorité fédérale allemande chargée des réseaux alerte : si les Allemands continuent de consommer le gaz à ce rythme, ils ne pourront éviter une pénurie l’hiver venu. Une histoire seulement allemande ? Ce serait oublier que la France fournit du gaz à son voisin, par « solidarité ».

Alors qu’en France l’on s’écharpe sur la communication maladroite d’un ministre de l’Économie prônant l’utilisation du pull à col roulé, l’Allemagne en est à tirer les premiers bilans de sa politique de sobriété initiée cet été. Et le pays germanique tire déjà la sonnette d’alarme : la dernière semaine de septembre, au plus fort de la baisse des températures, la consommation du gaz outre-Rhin dépassait de 14,5 % celle de l’année passée à la même époque. De quoi inquiéter l’Agence fédérale des réseaux.

Pour tenir l’hiver, les autorités allemandes considèrent que des économies de l’ordre de 20 % d’énergie sont nécessaires. ​​« La situation peut devenir très grave si nous ne réduisons pas sensiblement la consommation de gaz », a averti le jeudi 6 octobre Klaus Müller, directeur général de l’Agence fédérale des réseaux. L’Allemand note que si les industriels ont fait des efforts, ceux-ci restent insuffisants, n’atteignant que 2 % de la moyenne pluriannuelle. Quant aux particuliers, qui représentent environ 40 % de la consommation du gaz en Allemagne, leur dépassement des objectifs n’est pas sans conséquence.

« Sans économies importantes dans le secteur privé également, il sera difficile d’éviter une pénurie de gaz en hiver », estime Klaus Müller. Le comportement des usagers lors de la première pointe de froid inquiète Berlin, bien qu’une partie des Allemands semblent jouer le jeu en dehors de ces périodes. La consommation au mois d’août a baissé de 22 %, mais plus du fait des efforts réalisés au sein des services publics et des groupes industriels que des particuliers.

La France livre du gaz à l’Allemagne

Mais au fond, ne s’agit-il pas ici d’un problème allemand qui ne regarde en aucun cas la France ? Pourquoi irions-nous surveiller la température de chauffage qu’un Allemand peut régler dans son domicile ? Il s’agit d’un peuple souverain qui peut bien faire ce qu’il entend. Mais ce serait oublier l’interaction des réseaux énergies sur le territoire de l’Union européenne, tout comme les accords de « solidarité » entre nations, particulièrement celui conclu entre la France et l’Allemagne. Qui nous oblige… et les oblige ?

C’est ainsi que le 5 septembre, lors d’une visioconférence, le chancelier allemand Olaf Scholz et le président français ont annoncé un accord de coopération.

« Nous allons finaliser les connexions gazières pour pouvoir livrer du gaz à l’Allemagne »

avait expliqué Emmanuel Macron à l’issue de cette réunion, ajoutant que cela serait fait « s’il y avait un besoin de solidarité ». En contrepartie, Berlin exporterait de l’électricité à Paris — ce qu’elle fait de toute façon déjà, contrairement à l’importation de gaz venu de France — lorsque la capitale ferait face à des pics de consommation.

À partir de la deuxième semaine d’octobre, du gaz pourra être exporté directement de la France vers l’Allemagne via un gazoduc passant par Gersheim-Medelsheim, initialement prévu pour une circulation inverse. La France s’est engagée à fournir 100 gigawattheures sur les 3 200 quotidiens nécessaires à l’Allemagne. Soit un peu plus de 3 % de la consommation allemande. À l’heure où le continent européen est à la diète énergétique, à l’heure où une mauvaise maîtrise de la consommation du gaz pourrait créer une pénurie et une tension accrue sur les prix du gaz, la France peut légitimement s’interroger : pourquoi les Français devraient-ils faire des efforts que leurs voisins allemands refuseraient de faire ?

La solidarité est un principe qui va dans les deux sens.

Mais il en va bien souvent ainsi dans le couple franco-allemand : le second se gave de la naïveté du premier.

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Une réponse

  1. On va donner du gaz en Allemagne, mais en échange, on importera de l’électricité fabriquée à partir de charbon, voire même de lignite.
    C’est cela la vertu climatique.

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