(Début d’un article de Transitions & Energies du 12 Janvier 2023)
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Une énergie plus rare et plus chère signifie d’une façon ou d’une autre un appauvrissement puisque la quasi-totalité de l’activité économique peut se traduire par des échanges d’énergie.
Cela signifie que la décarbonation sera une épreuve. Il suffit pour cela de mesurer les conséquences de l’envolée depuis un an des prix du gaz et de l’électricité. Il faut s’y préparer. Il faut le reconnaître.
Pas comme la Première ministre, Élisabeth Borne, déclarant le 17 novembre devant l’Assemblée nationale que grâce à la transition énergétique « les Français vont vivre mieux ».
Par Éric Leser. Article publié dans le numéro 15 du magazine Transitions & Energies.
Faire payer ce qui n’avait jusque-là pas de prix – le carbone – aura un impact considérable, économique, social et politique.
Sur la croissance, l’emploi, l’investissement, l’inflation, les inégalités, le pouvoir d’achat, le niveau de vie des populations, les comptes publics, la rentabilité des entreprises.
Le discours ambiant nie cette réalité, la quasi-totalité de l’activité économique repose d’une façon ou d’une autre sur les énergies fossiles. Y compris la transition énergétique avec le transport, l’installation et la fabrication des éoliennes, des panneaux solaires et des véhicules électriques.
Les carburants fossiles assurent aujourd’hui en Europe 78 % de la consommation d’énergie et dans le monde plus de 81 %. Juste un exemple mis en avant par Vaclav Smil, le plus grand spécialiste mondial de l’énergie, suffit à décrire cette réalité.
Notre civilisation est construite à partir de quatre matériaux indispensables fabriqués presque exclusivement avec du gaz, du charbon et du pétrole :
- le ciment (le plus utilisé dans le monde après l’eau) produit chaque année à 4,5 milliards de tonnes,
- le fer (1,8 milliard de tonnes),
- le plastique (370 millions de tonnes)
- et l’ammoniac (150 millions de tonnes) sans lequel il n’y a plus d’engrais azotés et pas de quoi nourrir 8 milliards d’humains.
Comment nourrir 8 milliards d’humains?
La question de l’alimentation est emblématique des dilemmes auxquels nous sommes confrontés.
Sans énergies fossiles, la production, le stockage et la distribution des produits alimentaires sont plus difficiles, moins efficaces et plus coûteux. Aujourd’hui, pour produire un kilo de poulet, il faut au minimum 350 millilitres de pétrole, entre 200 et 250 millilitres pour un kilo de pain et 500 millilitres pour un kilo de tomates cultivées dans une serre.
Les substituts dits naturels aux engrais chimiques et aux produits phytosanitaires réduisent fortement la productivité agricole qui a fait des progrès extraordinaires depuis soixante-dix ans.
Cette révolution agricole ininterrompue a permis de nourrir, beaucoup mieux et beaucoup trop dans les pays riches, une population multipliée par quatre et de réduire dans des proportions très importantes la malnutrition et les famines. En 1800, il fallait cent cinquante heures de travail humain (et animal) pour produire un hectare de céréales, aujourd’hui, il faut deux heures grâce aux machines… qui fonctionnent avec de l’énergie.
Notre alimentation va nous coûter plus cher, bien plus cher.
D’une façon ou d’une autre, il va falloir payer l’accélération de la transition énergétique que nous vivons et allons vivre pour tenter dans l’Union européenne de réduire de 55 % le volume des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030.
Les gouvernements sont dans le déni. La Première ministre Élisabeth Borne, ancienne ministre de la Transition écologique, a même osé déclarer le 17 novembre devant l’Assemblée nationale que « les Français vont vivre mieux grâce à la transition énergétique ».
Même si le terme « mieux » est difficile à définir, c’est tout simplement impossible.
De l’énergie plus rare et plus cher ne peut que se traduire par un appauvrissement.
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