Catastrophisme climatique : le délire manipulateur du Secrétaire Général de l’ONU

António Guterres, secrétaire général de l’ONU, n’a épargné aucune grandiloquence à son auditoire à l’occasion de la présentation le 20 mars 2023 d’un énième rapport de synthèse sur l’état des connaissances climatiques par le GIEC. “The climate bomb is ticking !”. “Today’s IPCC report…  is a survival guide for humanity”. Rien que ça ! Guterres a exhorté les pays riches à accélérer leur course vers une société à émissions « Net Zéro », en fixant cet objectif à l’horizon 2040 plutôt que 2050.

Ce nouveau rapport du GIEC a, évidemment, fait l’objet de reprises empreintes de catastrophisme par de nombreux grands médias et par le gouvernement français sur le site officiel du ministère de l’Écologie. Si le GIEC le dit, si l’ONU le dit, il faut agir !

Le Net Zéro 2040 (ou 2050), une utopie économiquement et démocratiquement dangereuse

Or, que ce soit pour 2040 ou même 2050, l’atteinte du mythique “Net Zéro” est inenvisageable. Cet article s’en tiendra à l’examen de ce que cela signifierait pour l’Union européenne, mais les conclusions seraient valides pour tout autre pays développé.

“Net Zéro” est le niveau d’émissions qu’il ne faut pas dépasser pour rester en deçà de la capacité d’absorption de CO2 par les puits de carbone naturels de la Terre. Il est estimé par le GIEC autour de 2 t de CO2 par an et par habitant. La population de l’Union évoluant peu, autour de 450 millions, nous retiendrons que le Net Zéro correspond à environ 900 millions de tonnes annuelles de CO2[1] émises.

Ces émissions dépendent de la capacité qu’ont les économies de réduire la quantité d’énergie nécessaire pour générer un point de PIB, et la quantité de CO2 nécessaire pour produire une unité d’énergie. Cette dépendance entre facteurs est matérialisée par une formule intitulée « égalité de Kaya[2] », dont l’expression la plus simplifiée peut s’écrire :

Émissions de CO2 = intensité CO2 du PIB * PIB

L’égalité de Kaya est utile lorsque l’on veut comparer deux années, pour voir comment chaque facteur évolue  en fonction des autres. Autrement dit,

Variation (émissions) = variation (intensité CO2) * variation (PIB)

Voici comment a évolué l’intensité carbone de l’économie de l’Union européenne entre 1990 et 2019[3]:

AnnéePIB de l’UE
(En Tn USD constants base 2015)
Émissions de GES (en milliards de tonnes équivalent CO2)Intensité CO2 du PIB (en Kg par USD)
19909,054,190,462
201914,773,150,210
Évolution annuelle moyenne 1990-2019+1,7%-1%-2,7%

Notons que l’UE est de loin la zone géographique qui a le plus réduit son intensité carbone durant cette période.

Utilisons l’égalité de Kaya pour évaluer les résultats économiques de la mise en œuvre des suppliques de M. Guterres et de quelques autres scénarios.

Quelle serait la variation du PIB de l’UE entre 2020 et 2040 si nous n’émettions plus que 900Mt à cette date, tout en maintenant notre performance annuelle de réduction d’intensité carbone ?

Variation 2020-2040
(émissions)
Variation
(Intensité carbone)
Variation
(PIB)
Commentaire
X 0,285
(-71.5%)
X 0.58
(-42%)
X 0,49
(-51%)
Atteindre le Net Zéro en 2040 suppose de diviser le PIB de l’UE par 2, soit en moyenne 3.5% de décroissance par an !

Notons qu’il n’était guère plus réaliste d’espérer le Net zéro en 2050, le même calcul aboutissant à une baisse du PIB de « seulement » 36% sur 30 ans.

Ne pourrait-on cependant espérer améliorer le rythme de la décarbonation de notre économie en investissant massivement pour cela ? 
Hélas, même si nous réussissions, on ne sait par quel miracle, à doubler ce rythme à 5,4% par an, la variation de PIB calculée comme précédemment serait encore négative de 10%, soit 0,5% de décroissance annuelle.

Comment alors pourrait-on, dans une économie décroissante, financer les énormes investissements nécessaires à la décarbonation, tant en recherche et développement que pour leur déploiement ? ll en résulterait un appauvrissement dont les conséquences s’étendraient bien au-delà, à commencer par la faillite inévitable de nos états-providence surendettés, et l’explosion du nombre de ménages en très grande pauvreté.

De toute façon, dans une économie libre, la décroissance ne se décrète pas : les agents économiques continuent de faire prospérer leurs affaires bon an mal an. Réduire le PIB, quel qu’en soit le rythme, suppose des mesures coercitives majeures, interdisant à certains secteurs de produire et encadrant la consommation des ménages. Est-ce ce que veulent M. Guterres et ceux qui s’en inspirent ?

Différence climatique entre « Net Zéro 2040 » et un scénario « business as usual »: non mesurable

Quelle serait la réduction des émissions envisageable dans un scénario « business as usual » ? Si l’UE continue de croître au rythme antérieur (peu exaltant) de 1,7% par an et améliore son intensité carbone de 2,7% par an, on peut la situer à environ 20%. Serait-ce suffisant pour ne pas « dégrader » le climat mondial ?

Variation 2020-2040
(émissions)
Variation
(Intensité carbone)
Variation
(PIB)
Commentaire
X 0.81
(-19%)
X 0.58
(-42%)
X 1,40
(+40%)
La poursuite d’une politique “Business as usual” permet d’envisager environ 20% de réduction des émissions de l’UE d’ici 2040.

Le GIEC, dans son rapport AR6 de l’année passée, donne les éléments[4] permettant de calculer l’impact de différents scénarios sur les températures, en supposant bien sûr que son travail ne soit pas entaché de biais tendant à l’exagération.

Dans un scénario “business as usual”, les émissions de gaz à effet de serre (GES) cumulées de l’UE entre 2020 et 2040 seraient d’environ 56 Gt. Dans l’hypothèse où il serait possible d’obéir à l’injonction de M. Guterres, ces émissions tomberaient à 40 Gt pendant la même période. Quel serait l’impact d’une différence de 16 Gt sur la moyenne des températures mondiales ? Selon le GIEC, 1000 Gt émises aboutiraient à une augmentation des températures d’environ 0.45°C. L’impact climatique de 16 Gt en plus ou en moins représente donc… 7 millièmes de degré Celsius, moins d’un centième ! Autant dire que ce ne sera même pas mesurable. Rappelons que plus de 60% des émissions mondiales de GES seront le fait du continent asiatique d’ici 2030, contre 7% pour l’UE[5], et que selon toute probabilité, cette proportion augmentera d’ici à 2040.

Si Guterres dit n’importe quoi, que vaut la parole du GIEC ?

António Guterres exhorte donc les pays riches à saborder leurs économies pour un résultat climatique proche de zéro. Il est trop bien informé pour ne pas savoir tout cela. Son discours ultra-alarmiste et ses injonctions destructrices dirigées uniquement contre l’occident riche sont donc, à l’évidence, une manipulation grossière, dont les buts réels restent encore à élucider.

Le caractère grotesque des exagérations de M. Guterres, visant à provoquer une résonance médiatique anxiogène auprès des populations, doit conduire les gouvernements, les décideurs et le public à s’interroger sur la valeur réelle des synthèses du GIEC. Sont-elles réellement les résumés objectifs de l’état de la science qu’elles prétendent être ? Mais alors, pourquoi accompagner leurs publications de discours aussi ridiculement exagérés ?

[1] Nous considérons ici les émissions de tous les gaz à effets de serre, convertis en “équivalent CO2” selon les coefficients définis par le GIEC.

[2] Du nom de l’économiste qui l’a formalisée le premier.

[3] Source: https://ourworldindata.org/greenhouse-gas-emissions

[4] AR6 (2022), Sous-Groupe 1, résumé pour décideurs, page 28. https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg1/downloads/report/IPCC_AR6_WGI_SPM.pdf

[5] Tous ces points sont développés dans notre rapport “examen critique des politiques climatiques de l’Union Européenne”, https://fr.irefeurope.org/featured/article/les-politiques-climatiques-zero-emissions-nettes-de-lunion-europeenne-un-examen-critique/

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