Pour devenir plus populaire, l’Agence internationale de l’énergie a choisi de prendre ses désirs pour la réalité

(Transitions & Energies du 8/8/23)

L’AIE (Agence internationale de l’énergie) est depuis 49 ans une autorité dans le monde de l’énergie. Le problème est qu’elle a suivi depuis quelques années la voie de nombreuses institutions internationales et même nationales quand il s’agit de construire des scénarios de transition énergétique. Le militantisme et le volontarisme ont pris le pas sur le réel, ce qui a conduit à l’élaboration de scénarios et d’hypothèses de plus en plus improbables. Comme par exemple le fait, pour parvenir à « net zéro » émissions de gaz à effet de serre en 2050, que la consommation et les prix des énergies fossiles vont baisser rapidement et naturellement dès 2030…

L’Agence internationale de l’énergie (AIE), basée à Paris, est une institution internationale fondée en 1974 au sein de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) avec pour mission de travailler à la sécurité d’approvisionnement en énergie. Dans un discours devenu célèbre de décembre 1973, baptisé Pilgrim Speech, Henry Kissinger, alors Secrétaire d’Etat des Etats-Unis, se proposait d’apporter une réponse au choc pétrolier qui était « la garantie de l’approvisionnement en énergie nécessaire à un coût raisonnable ».

L’AIE était un outil de cet engagement. L’institution a pendant longtemps été caractérisée par le caractère particulièrement austère de ses rapports, par une réticence  certaine envers la transition énergétique et un attachement à la sécurité des approvisionnements pétroliers. Ce qui lui a été reproché. Mais au cours des dernières années, elle a changé totalement de doctrine au point de devenir un fer de lance de la transition et des objectifs de décarbonation accélérée. Le problème, est qu’en passant d’un extrême à l’autre, l’institution a parfois perdu pied avec le réel. Elle pratique maintenant assez souvent la méthode Coué. Sa feuille de route pour parvenir au fameux « net zéro » émissions en 2050 (Net Zero by 2050: A Roadmap for the Global Energy Sector) publié en 2021 et depuis plusieurs fois actualisé présente de très, trop, nombreuses failles méthodologiques. Comme si les hypothèses avaient été choisies en fonction du résultat à atteindre et pas de la réalité.

«Des hypothèses irréalistes, incohérentes… »

Ces failles sont notamment détaillées dans une étude publiée récemment aux Etats-Unis par la Energy Policy Research Foundation. Une organisation encore plus ancienne que l’Agence internationale de l’énergie qui a été elle fondée en 1944. Son document est sans appel. « Les hypothèses de l’AIE sont irréalistes, incohérentes et soutiennent souvent les arguments en faveur d’une augmentation de la production d’hydrocarbures. En réalité, la feuille de route zéro net de l’AIE est un mirage vert qui augmentera considérablement les coûts de l’énergie, dévastera les économies occidentales et augmentera les souffrances humaines ».

L’hypothèse fondamentale qui sous-tend la feuille de route zéro net de l’AIE est que la supériorité des alternatives aux hydrocarbures, notamment en termes de coûts – principalement l’éolien et le solaire (le nucléaire est à peine pris en compte) – entraînera une diminution de la demande de charbon, de pétrole (peak oil) et de gaz naturel.

Une baisse de la demande et des prix des hydrocarbures qui ne correspond en rien à la réalité

Le problème est que l’hypothèse de l’AIE d’une baisse rapide de la consommation d’énergies fossiles ne correspond pas du tout à la réalité actuelle. La demande d’énergies fossiles, y compris même de charbon, ne cesse de croître. Et pourtant, à partir de cette hypothèse l’AIE échafaude un scénario de baisse des prix des hydrocarbures. Le baril de pétrole descendrait à 35 dollars en 2030 (moins …

 

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