Et si, pour réduire les émissions mondiales, la France devait augmenter les siennes ?

À contresens des discours écologiques du moment, Sylvain Remy affirme que la France, moins carbonée, devrait augmenter ses émissions pour réduire l’empreinte carbone mondiale.

Il paraît que pour préserver le climat de la planète, la France doit réduire ses émissions de CO2 et autres gaz à effet de serre, et peut-être même à n’importe quel prix. En même temps, la Chine augmente chaque année ses émissions de CO2 d’environ 4 %, soit 450 Mt, ou une fois et demie les émissions annuelles totales de la France. Derrière la Chine se profile un cortège d’économies émergentes bien plus peuplées que la France : Inde, Indonésie, Nigéria, Brésil, etc.

À quoi sert-il donc que la France réduise ses propres émissions dérisoires ? On entend souvent dire que c’est parce qu’elle doit se montrer « exemplaire »…

Mais pour montrer l’exemple, la France doit au contraire augmenter ses émissions de gaz à effet de serre !

En effet, l’intensité en carbone varie énormément selon les économies. La Chine émet presque cinq fois plus de CO2 (570 g) par dollar de production que la France (120 g), en tenant compte de la différence de niveau de vie entre les deux pays. Un moyen de réduire les émissions mondiales serait donc de transférer de la production d’un pays émergent plus carboné (comme la Chine) vers un pays développé moins carboné (comme la France). En conséquence, le pays destinataire émettrait certes plus, mais le pays d’origine émettrait encore moins en contrepartie, la réduction nette atteignant jusqu’à −80 % (dans le cas d’un transfert de la Chine vers la France).

Plus précisément, les pays émergents désirent, à bon droit, augmenter leur production, même au prix écologique fort (tout comme la France au temps de sa propre révolution industrielle).

Il s’agit donc plutôt de transférer une partie de la croissance de la production des économies plus carbonées vers les autres. Certains se contentent de proposer aux économies moins carbonées de transférer des technologies pour décarboner les autres, mais c’est négliger que l’innovation, qui a engendré ces technologies, repose sur une production de proximité. Une économie qui produit davantage finit par innover davantage (comme le fait déjà la Chine) ; et vice versa, une économie qui produit moins finit aussi par innover moins. Les économies moins carbonées doivent donc produire plus pour décarboner la production mondiale, non seulement tout de suite, mais aussi plus tard, grâce à de futures innovations.

La France est remarquable car son économie émet le moins de CO2 au monde pour sa taille. Elle ouvrirait mieux la voie en assumant une plus grande part de la production mondiale, au minimum pour importer moins depuis des pays plus carbonés qu’elle (c’est-à-dire quasiment tous), et peut-être aussi pour exporter davantage vers eux. Et d’autant plus à l’avenir que ce supplément de production encouragerait un supplément d’innovations à bas-carbone. Cela revient à augmenter les émissions du pays !

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