Taxer la viande pour lutter contre le réchauffement : encore une mauvaise idée !

Les écologistes voudraient que nous arrêtions de manger de la viande. En raison de l’inquiétude croissante suscitée par le changement climatique et de la volonté d’arriver à un bilan « zéro carbone » en réduisant les émissions de gaz à effet de serre, nombreux sont les partisans de ce diktat, à gauche.

Récemment, Fabien Roussel, chef du Parti communiste, a été « attaqué »  par Sandrine Rousseau, élue du parti écologiste, qui lui reprochait de manger du steak. « Non Fabien, tu ne gagneras pas avec un steak », a déclaré Mme Rousseau, qualifiant la viande rouge de « symbole de virilité ».

La pression sur les consommateurs de viande s’intensifie. Des politiques visant à restreindre l’achat et la vente de viande pourraient bientôt voir le jour. Déjà, en 2021, Barbara Pompili avait  exprimé le souhait  que les cantines scolaires et la restauration publique suppriment la viande des assiettes et ne proposent que des repas végétariens au moins un jour par semaine.

L’irrésistible attrait de la taxe

Malheureusement, ce n’est qu’une question de temps avant que l’idée ne fasse son chemin et que la taxation sur les produits carnés, au même titre que d’autres produits de consommation comme les cigarettes et l’alcool, ne s’impose. Les échéances fixées pour parvenir à des émissions nettes nulles se rapprochent de plus en plus. C’est dans l’air du temps. Beaucoup de pays, même le gros producteur qu’est la Nouvelle-Zélande, semblent déjà prêts à introduire une taxe sur la viande. La France pourrait s’y rallier.

Il est vrai que l’élevage d’animaux, en particulier de vaches, est à l’origine de niveaux élevés d’émissions de gaz à effet de serre, notamment de méthane. Cependant, cela n’implique pas que l’État doive imposer une taxe sur les produits carnés. Il y a déjà bien assez de taxes, et elles ont bien assez augmenté ces dernières décennies, le gouvernement ne manquant pas d’imagination pour prélever de l’argent dans les poches de ses citoyens. Il serait bon que les responsables politiques finissent par faire preuve d’un peu de retenue. D’autant plus que tout porte à croire que cette nouvelle taxe  sur la viande ne permettra pas d’atteindre son objectif.

Les taxes punitives ne fonctionnent pas

Il existe de nombreuses preuves que les « taxes sur le péché » destinées à modifier le comportement des consommateurs ne fonctionnent pas. Par exemple, au Royaume-Uni qui, en 2018, a introduit une taxe sur le sucre pour les boissons gazeuses, espérant lutter contre l’obésité. Les consommateurs n’ont pas accepté l’augmentation de prix assortie : ils ont tout simplement modifié leur comportement d’achat afin d’y échapper. Certains se sont rabattus sur des boissons moins chères, comme les produits de première marque des supermarchés. D’autres ont préféré des jus de fruits, plus riches en calories et en sucre. Un troisième groupe a tout simplement payé plus cher, mais n’a pas sacrifié ses préférences. Il arrive fréquemment que les taxes punitives ratent leur objectif principal mais provoquent des effets secondaires qui n’avaient pas été prévus. Il n’y a aucune raison de penser qu’une taxe sur la viande serait différente.

Le soja comme remède… pire que le mal

Elle pourrait même se retourner contre nous et, au lieu de sauver la planète, lui faire encore plus de tort que ce qu’elle est censée contrecarrer. Si l’État impose l’abstinence, nombre de consommateurs pourraient remplacer la viande par des produits protéinés d’origine végétale. Or la plupart des substituts de ce type  disponibles à l’heure actuelle, comme le tofu et le tempeh, sont tous fabriqués à partir de soja, qui est sans doute bien plus nocif pour la planète que la viande. La culture du soja implique de d’abord défricher de très grandes superficies de terre, ce qui entraîne une accélération de la déforestation. Elle  provoque aussi l’érosion des sols, ce qui rend plus difficile l’implantation d’autres cultures ensuite. En outre, les émissions de gaz à effet de serre liées à la production de soja sont très  élevées. Tous ces problèmes pour l’environnement n’existent pas dans l’élevage.

Taxer la viande pour lutter contre le changement climatique est donc une mauvaise idée. Cela ne changera selon toute vraisemblance pas grand-chose dans le comportement des consommateurs. Seul résultat certain : s’alimenter deviendra plus onéreux, à un moment où l’inflation est élevée, et ce sont les plus pauvres qui en pâtiront. Plus important peut-être même, une taxe sur la viande violerait encore un peu plus les droits fondamentaux des citoyens. Imagine-t-on pouvoir un jour, dans nos pays occidentaux censés protéger les libertés, être « puni » parce qu’on a mangé un steak frites ?

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3 réponses

  1. Il est exact que l’on peut s’interroger sur le méthane car ce gaz est un réel GES bien plus important que le CO2, dont la proportion anthropique dans l’atmosphère n’est que de 0,04 % environ (chiffre GIEC). De plus le méthane se dégrade lentement alors que le CO2 est relativement vite absorbé par la végétation, les océans et le plancton. Au total la chasse au CO2 est une absurdité, alors que celle du CH4 pourrait être justifiée. Encore faudrait-il savoir quelle est la proportion de CH4 anthropique, telle que celle produite par ces maudits bovins, par rapport au CH4 naturel émis par exemple par les forêts tropicales et amazoniennes. Ce point important reste à préciser par les chercheurs. Ceux du LSCE français en sont conscients (discrètement) mais je ne crois pas avoir vu quelque chose de décisif sur ce point. En tout état de cause, même si le CH4 anthropique avait une influence en tant que GES, il reste que l’effet de serre lui-même est loin d’être le seul facteur à prendre en compte dans les évolutions climatiques. Il est même probablement insignifiant devant les facteurs naturels, lesquels sont bien sûr ignorés du GIEC…

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