Pédagogie d’un suicide énergétique assisté par la démagogie et par l’ignorance collectives

(Article initialement publié sur Front Populaire, sous le titre « Entre démagogie et ignorance : le suicide énergétique de la France« )

L’avertissement suivant devrait figurer au fronton de nos mairies, de nos écoles, de nos universités et même à ceux de l’hôtel Matignon, des palais Bourbon, du Luxembourg et de l’Élysée, au nom de la sauvegarde de notre condition :

l’énergie que l’instrument électrique est chargé de collecter et de mettre commercialement à disposition des usagers ne peut provenir que de trois stocks : le stock des matières radioactives, le stock des matières combustibles et le considérable stock solaire dont on ne peut capter en direct et en différé que la fuite ténue, notamment grâce à l’aménagement de nos cours d’eau.   

Partout où c’est possible, une déclinaison de cet avertissement devrait même interpeller les Français avec ceci :

dans l’Univers, la matière première « énergie » est toujours tirée d’un stock et reste potentielle jusqu’à ce qu’on la consomme. Le débit alors créé entre le stock et le consommateur s’appelle la puissance et se mesure en watts – valant 1 joule (unité d’énergie) par seconde – symboles W et KW, MW, GW, TW pour ses multiples. La quantité de watts livrée durant un temps donné se nomme énergie consommée, s’évalue et se facture en wattheures : Wh, KWh, MWh, GWh, TWh.   

L’avertissement ne serait pas complet sans rappeler que la totalité des stocks d’énergies auxquels l’existence de l’humanité est suspendue ne se trouvent que sur sa planète et dans son étoile ; rappeler également que, si les hommes peuvent disposer des stocks terrestres à leur guise, c’est-à-dire aux puissances requises à chaque instant par les besoins de leur civilisation – fût-ce jusqu’à en risquer l’épuisement –, il n’en va pas de même pour eux avec le stock solaire : on ne commande ni en durée, ni en qualité, ni en opportunité à un dispatcher extra-terrestre l’insolation de sa planète et la météo en découlant.     

Il y a donc urgence à porter cet avertissement aux oreilles de bien des Français. Trop d’entre eux continuent de méconnaître que leur vie domestique et l’économie de leur pays sont à chaque seconde mis en mouvement par d’indéfectibles KW dont la facture bisannuelle du cumul, en KWh, ne rend pas compte de la continuité ou de la discontinuité du service. Dans leur majorité, ces compatriotes tournent de surcroît le dos aux technologies dont ils savent très bien qu’elles génèrent les KWh les plus abondants et les moins chers. Faut-il que l’engagement partisan et idéologique ait à ce point imprégné la conscience, pour en arriver à savonner ainsi la planche de son propre confort matériel et financier ?

Selon une récente enquête du CRÉDOC (1), 82 % de nos compatriotes sont favorables à la lutte massive contre le réchauffement climatique, sans être pour autant disposés à contribuer à son financement ! Seulement 38 % des sondés souhaitent à des degrés différents orienter ce financement vers l’énergie nucléaire, quand 55 % priorisent de l’investir dans les énergies renouvelables tout en n’acceptant qu’à 21 % d’augmenter leur fiscalité pour financer la transition écologique ! Il relève du miracle que 19 % de ces défenseurs de l’environnement aussi volontaires que démunis soutiennent le développement de la voiture électrique.

On convie ces derniers à prendre connaissance de l’ineptie pratique, technologique et industrielle au nom de laquelle les irresponsables Bruxellois, Strasbourgeois et Parisiens davantage que Berlinois ont programmé le sabotage économique et social le plus criminel de l’histoire (2). Pour se faire une idée de ce que pourra être, selon eux, un parc automobile français de 35 millions de véhicules électriques dont la batterie stocke en moyenne 50 KWh, on invite le lecteur à imaginer le trafic d’une station-service d’autoroute dotée de 20 bornes de 300 KW. À raison de 6 MW la station, inutile de rêver en consteller le pays par milliers qui, avec la production décentralisée des renouvelables, jetteraient sur le territoire national le filet à mailles serrée d’un réseau électrique de dizaines de milliers de Km. Si la charge complète d’une batterie de 50 KWh appelle une puissance de 50 KW pendant une heure, elle appelle 100 KW pendant une demi-heure ou 200 KW pendant un quart d’heure. À la lumière de ce que le lecteur trouvera dans l’article recommandé ci-avant, on le laisse imaginer ce que promet d’être la vie d’un automobiliste privé, collectif ou professionnel exclusivement électriques.

L’attention des Français est par ailleurs attirée sur la mésaventure rapportée ci-après dont l’Allemagne et, dans une moindre mesure, les Pays-Bas ont fait cruellement les frais les 12 et 13 décembre derniers. Elle démontre, si besoin était, que le marché naturel de l’électricité est celui de la puissance disponible et non celui de la puissance consommée et par conséquent que la concurrence s’exerce bien davantage entre ses modes de production qu’entre ses « fournisseurs ». Elle démontre surtout que, avec la complicité des gouvernements nationaux, l’UE escroque les consommateurs européens depuis 18 ans en donnant la priorité absolue aux KW les moins disponibles, éoliens et photovoltaïques, ce qu’elle a le culot de prétendre conforme à la concurrence libre et non faussée.

En l’absence de vent et de soleil, la couverture d’une consommation électrique allemande totalement suspendue à des productions charbonnière et gazière au taquet a dû faire massivement appel à l’importation de 18 GW durant près de 24 heures, conduisant le prix spot du MWh à frôler les 1000 euros (3) ; un cours à rapprocher des 42 euros auxquels l’ARENH arrache à EDF le quart de sa production nucléaire mis à disposition des « fournisseurs alternatifs ». Ainsi, l’Allemagne a-t-elle dû débourser chaque heure 18000 fois 1000 euros pour s’approvisionner en électricité, soit, sur la période concernée, 24 fois 17 millions d’euros : 400 millions d’euros. Parmi les Allemands auxquels incombe d’acquitter une telle facture alourdie du coût de la commercialisation du produit, on sait combien les consommateurs domestiques sont privilégiés !  

Ne surtout pas croire que pareille mise en danger du système électrique constitue une rareté ailleurs que dans cette Allemagne en devenant coutumière. Ce que les Français ont vécu au cours de l’année 2022 et des auspices politiques, économiques et industriels guère réjouissants indiquent au contraire que l’accroissement de sa fréquence est à redouter. C’est pourquoi qualifier de suicide énergétique ce à quoi le pays ne peut plus échapper n’est pas un abus de langage. Ce suicide est patiemment ourdi par la mentalité caractérisée plus haut et au pouvoir depuis 25 ans, à laquelle on doit aujourd’hui que 37 à 40 % d’une puissance renouvelable, ingouvernable et appelée à croître – 17 GW d’éolien et 15 GW de photovoltaïque sur 80 à 85 GW tout au plus – couvrent moins de 15 % de notre consommation d’électricité, soit 72 TWh sur 495 TWh, un funeste décrochage ne pouvant aller qu’en s’aggravant.

Non seulement il n’est pas possible de réparer en quelques mois un complexe électro-industriel saboté avec autant de constance et depuis si longtemps, non seulement une affligeante actualité nous révèle que le financement de la réparation tout juste amorcée est introuvable, mais la France est désormais bel et bien à la merci des black-out hivernaux auxquels menace de la contraindre la survenue de la pointe historique de 102 GW. Nous venons de voir que les Allemands ne seraient hélas pas les premiers capables de voler au secours de nos guère plus de 85 GW.

La mort dans l’âme, les Français doivent donc se rendre à l’évidence que, comme les Messerschmitt me 262, les V1 et autres V2 ne permirent pas aux Allemands de gagner la guerre, il est à craindre que notre EPR arrive trop tard pour nous permettre de gagner la guerre énergétique dans des délais raisonnables. On trouvera en (4) ce qu’il y a savoir sur le superbe instrument venant tout juste d’être couplé au réseau ; l’occasion de prendre conscience qu’on n’a épargné à l’instruction et à la réalisation de ce laborieux projet aucune des carences en compétences et en développement industriel que des politiques sans foi ni loi infligent au pays depuis 1997.     

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(1)  https://www.credoc.fr/publications/fiscalite-environnementale-les-francais-partages-entre-conscience-ecologique-et-rejet-de-la-pression-fiscale

(2)  https://www.europeanscientist.com/fr/opinion/mobilite-electrique-des-lions-menes-par-des-anes/

(3)  https://www.youtube.com/watch?v=gVSkBVLoDK4

(4)  https://www.contrepoints.org/2024/09/05/478846-lepr-parti-pour-une-carriere-de-type-concorde-ou-de-type-rafale et https://www.europeanscientist.com/fr/opinion/lepr-de-flamanville-demarre/

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Une réponse

  1. La bonne question à se poser est: Comment une frange aussi importante de la population française a-t-elle pu croire aux discours sur les dangers du CO2, sur les solutions pour les éviter et ne pas comprendre que les dangers étaient inexistants et que ces solutions étaient utopiques et que leurs mises en œuvre se feraient à ses dépends pour le plus grand profit de minorités? Les réseaux sociaux n’ont servis à rien dans ces domaines! La désinformation n’a jamais pu être contestée par les plus clairvoyants.
    Quelles actions ces derniers ont ils donc omis de faire pour éviter cette catastrophe?

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